Autour de la 2ème guerre mondiale
Le centre Régional d’Histoire de la résistance et de la Déportation (CNRD) est un lieu de mémoire. Son objet premier est de perpétuer le souvenir de la Résistance et de la Déportation auprès d’un jeune public (collégiens, lycéens) … mais pas que … puisque l’entrée est libre. Des professeurs et des bénévoles assurent les visites, conférences et expositions. Il est important de poursuivre ce travail de mémoire auprès d’une jeunesse ancrée dans un monde virtuel qui ne mesure pas toujours la chance d’être la 2ème génération à n’avoir pas connu la guerre. Nous, enfants de la guerre ou de l’après-guerre, n’avons pas toujours su être des passeurs de mémoire. Pourtant, sans avoir une connaissance encyclopédique de la période, nous avons grandi dans les récits de nos proches, qu’ils soient soldats, résistants, prisonniers de guerre, civils témoins des bombardements ou qui ont connu le quotidien difficile voire insupportable de la présence allemande, du rationnement etc. Notre mémoire s’est enrichie des lectures, reportages, visites, commémorations perpétuant l’histoire de cette seconde guerre mondiale. D’une certaine façon, nous avons tous baigné dans les récits de l’après-guerre. Et chacun à son histoire, la mienne en Normandie, terre du débarquement et de combats qui ont meurtri les villes et les campagnes comme les populations civiles. Mon histoire, c’est aussi celle d’un père, fait prisonnier à Zuydcoote et resté 5 ans en captivité à proximité de la frontière tchécoslovaque.
Alors bien sûr, vous aussi, vous avez votre histoire personnelle mêlée à la Grande Histoire de la 2ème guerre mondiale, alors, probablement que ce CNRD n’est pas source de révélations, mais, dans sa modestie, il a rafraichi nos mémoires et rappelé la grandeur, mais aussi la faiblesse des hommes.
Concours national de la résistance et de la Déportation
Le département de l’Hérault associé aux archives départementales et au CNRD se sont impliqués dans le concours national de la Résistance et de la déportation dont le thème 2019/2021 est « 1940. Entrer en résistance. Comprendre, refuser, résister». L’objectif est de perpétuer chez les jeunes, la mémoire de la Résistance et de la Déportation afin d’y puiser des valeurs civiques. 34 342 élèves issus de plus de 1 435 établissements répartis sur l’ensemble du territoire national ainsi que d’établissements français à l’étranger ont participé au
concours. Plusieurs centaines d’entre eux ont reçu des prix attribués par les jurys académiques. Les meilleurs copies et travaux ont été transmis au jury national par les rectorats et vice-rectorats. Le thème du concours 2022 est « La fin de la guerre. Les opérations, les répressions, les déportations et la fin du IIIe Reich (1944-1945)».
Montpellier pendant la 2ème guerre mondiale : Quelques repères.
- Montpellier est en « Zone libre » mais … quand même occupée du 11 novembre 42 au 23 août 44.
- Le 13 février 41, le maréchal Pétain accompagné de l’amiral Darlan, rencontre le général Franco à la préfecture de Montpellier.
- Montpellier est un centre important de la Résistance. Jean Moulin, enfant du pays, né à Béziers, futur chef de la Résistance, est immortalisé dans le fameux portrait au chapeau pris au pied d’un pilier de l’aqueduc des Arceaux.
- Montpellier a été bombardée 3 fois, en janvier, mai et juillet 44. Ces bombardements aériens américains par la 15ème USAAF, soutenus par des actes de sabotage de la résistance sont des attaques contre des convois allemands transportant soldats munitions, carburants. Le bombardement du 4 juillet 44 visait les voies ferrées et gares de triage afin d’empêcher l’acheminement de troupes allemandes sur le front de Normandie.
- La milice a occupé quelques mois (juin- août 44) la caserne de Lauwe, délai court mais suffisant pour torturer et exécuter des résistants.
- Montpellier a été libérée par la 1ére DFL (Division France Libre) du général de Lattre de Tassigny en août 44.
Résistants et maquis dans l’Hérault : Quelques exemples.
- Le maquis Valentin cantonné au Barthezes (La Salvetat)
- Le maquis Léon autour de Clermont-l’Hérault
- Le groupe Cabrol dans l’Ouest héraultais
- Le groupe Jean Grandel, installé au nord de Prémian, avant de se déplacer sur le Saint-Ponais.
- La villa Senaux à Fraïsse sur Agout fut un poste de commandement militaire important
- Le maquis La Tourette, implanté dans les Hauts cantons de l’Hérault était prévu pour être activé le jour du débarquement en Normandie. Le jour de son rassemblement fut le théâtre de « La tragédie de Fontjun » : suite à une embuscade allemande 23 maquisards furent tués.
- Le maquis Bir-Hakeim. Le plus important de la région se déplaçait entre Aveyron, Hérault, Cévennes. Il s’est un temps installé dans le massif de l’Espinasse.
Ce maquis a vécu un drame connu sous le nom de « Tragédie de la Parade ». Il faut en dire quelques mots pour éclairer cette période : « Sur les contreforts de l’Aigoual, les maquisards sont pourchassés par la milice et les GMR (unités paramilitaires crées par le gouvernement de Vichy). Mais la traversée de Meyrueis (Lozère) par le convoi de camion des maquisards n’est pas passée inaperçue. Avertie, la gendarmerie a informé le préfet qui a transmis l’information à l’état-major allemand »
Bilan : 34 maquisards tués au combat, 27 faits prisonniers et fusillés au col de la Tourette à Badoroux. Un triste exemple, parmi des milliers, de français (miliciens, Vichystes) qui dénoncent et envoient à la mort d’autres français !
Hommage au maquis Bir-Hakeim :
- Un monument a été érigé en 1984 sur la commune de Mourèze (Hérault) à la mémoire des 105 martyrs du maquis Bir Hakeim
- Il y a une stèle sur la commune de Badaroux en Lozère en mémoire des 27 fusillés et torturés du maquis
- Un monument dans le village de La Parade sur le causse Méjean en Lozère, a été élevé en hommage aux 61 résistants victimes de « La tragédie de la Parade »..
Femme parmi d’autres – Une héroïne Montpelliéraine
L’histoire locale et nationale, a retenu les noms de Jean Moulin ou de P.H. Teitgen, mais il faut aussi rendre hommage aux femmes de l’ombre comme Simone Demangel, nom de guerre : « Pauline » « Pauline » est une résistante de la 1ère heure, elle a caché des antinazis, des juifs, des réfugiés, fait des faux papiers. Recherchée par la Gestapo, elle rejoint le maquis « Léon » dans le secteur de Lodève. A la libération, elle entrera au conseil municipal de Montpellier au côté de la sœur de jean Moulin. Elle milite pour l’instauration du vote des femmes, crée à Montpellier « Le Nid » qui aujourd’hui encore accueille des prostituées. Elle fait venir l’abbé Pierre dans l’Hérault pour créer “Les Compagnons d’Emmaüs“. Une femme exemplaire en temps de paix comme en temps de guerre.
Lien vers un reportage de FR3 Occitanie :
La déportation
La section du CNRD consacrée à la déportation est la plus intéressante du centre. On retrouve une copie de la grille d’entrée du camp de concentration d’Auswitch et sa célèbre inscription « Arbeit macht frei » (le travail rend libre). Mais la liberté, peu l’on retrouvée. Il faut regarder l’immense carte qui montre les nombreux camps de concentration et d’extermination. Il est intéressant de relever les nombreux points qui relient des lieux de travail à chacun des camps : il s’agit des usines qui utilisaient cette main d’œuvre gratuite mais décharnée. Des photos, des peintures montrent l’effroi, l’horreur vécus dans ces camps de la mort.
S’il y a un livre à lire sur la vie dans ces camps c’est : « Si c’est un homme » de Primo Lévi.
Ce livre est l’un des témoignages les plus bouleversants sur l’expérience indicible des camps d’extermination. Primo Levi y décrit la folie meurtrière du nazisme. Primo Levi ne raconte pas la vie des camps de manière linéaire mais l’explique sur un ton neutre et dépassionné, c’est le lecteur qui ressent dans sa chair, le froid, la faim, les punaises, le mépris, les seaux d’aisances débordants qu’il faut aller vider en s’arrosant les jambes etc. « Primo Levi refuse de heurter le lecteur et préfère rester en deçà de l’horreur pour privilégier la réflexion et l’émotion » (cf. France Culture)
La 2ème guerre mondiale vue par des citations
- « C’est le cœur serré que je vous dis aujourd’hui qu’il faut cesser le combat.
- Philippe PÉTAIN (1856-1951), Allocution à la radio, 17 juin 1940
- « Ici Londres ! Les Français parlent aux Français. » Premiers mots des bulletins d’informations à la BBC, précédés des quatre premières notes de la Ve symphonie de Beethoven
- « Je n’ai rien à offrir, que du sang, de la sueur et des larmes » Winston Churchill – 13 mai 1940
- Vichy qui se roule dans la défaite comme un chien dans la mer Général Weygand
- « La vieillesse est un naufrage. Pour que rien ne nous fût épargné, la vieillesse du maréchal Pétain allait s’identifier avec le naufrage de la France. » Charles de GAULLE (1890-1970), Mémoires de guerre,
- Je ne savais pas que c’était si simple de faire son devoir quand on est en danger. » Jean MOULIN (1899-1943), Lettre à sa mère et à sa sœur, 15 juin 1940
- « J’invite tous les Français qui veulent rester libres à m’écouter et à me suivre.» Charles de GAULLE (1890-1970), Discours radiodiffusé, 22 juin 1940
- « Ami, entends-tu / Le vol noir / Des corbeaux / Sur nos plaines ? Ami, entends-tu / Ces cris sourds / Du pays / Qu’on enchaîne ? » Joseph KESSEL et Maurice DRUON – Le Chant des partisans (1943)
- « Nous vivions dans la crainte, maintenant nous allons vivre dans l’espoir. » Tristan BERNARD (1866-1947), à sa femme, dans le car de la Gestapo qui emmène le couple à Drancy, 1er octobre 1943
- Quelques Message de Radio Londres transmis les premiers jours de juin 44 annonçant le débarquement en Normandie :
- «Les carottes sont cuites»
- «Message important pour Nestor: la girafe a un long cou»
- «Les sanglots longs des violons de l’automne»
- «Le coq chantera trois fois»
- «Les chants les plus désespérés sont les chants les plus beaux»
- « Mais messieurs, si vous ne vouliez pas que je les reçoive chez moi, il ne fallait pas les laisser passer » Cécile Sorel au comité d’épuration
- « entre ici, Jean Moulin, avec ton terrible cortège. Avec ceux qui sont morts dans les caves sans avoir parlé, comme toi; et même, ce qui est peut-être plus atroce, en ayant parlé » André Malraux, le 19 décembre 1964 en hommage à Jean Moulin lors du transfert des cendres du résistant au Panthéon.
Épilogue
La seconde guerre mondiale et un écheveau géant. Si l’on tire un fil, il en vient un autre et c’est sans fin. Elle concentre ce qu’il y a de meilleur et de pire chez l’homme. LIBERTÉ : Beaucoup se sont battus pour elle, nombreux sont morts pour la défendre. Elle est encore et toujours aux frontons de nos mairies associée à l’égalité et à la fraternité. Que devenons nous quand aujourd’hui des anti-vax, anti-passe, manifestent au nom de leur liberté. Liberté ? Et la fraternité, elle est où ?
Merci au CNRD de Castelnau le Lez de faire œuvre de transmission et de raviver notre mémoire. Jacques Grosse
Merci à Jacques pour ce beau reportage. Merci également à Françoise Couderc et son équipe, bénéroles au CNRD, qui nous ont organisé ces visites. Merci à eux de perpétuer ce travail de mémoire pour témoigner, transmettre et ne pas oublier les heures sombres de notre histoire. “Il n’y a pas de bonheur sans liberté ni de liberté sans courage” Péricles Francette
Merci à Jacques pour ce travail de mémoire très complet, très précis.
Merci Francette, par cette visite d’avoir pu faire connaitre à un grand nombre le CNRD avec ces bénèvoles dévoués.
MICHEL
Je comprends pourquoi nous ne voyons plus notre grand ( par la taille !, mais pas seulement, la preuve est là ) Jacques sur les chemins, vu le temps qu’il a dû passer dans ses recherches pour rédiger ce remarquable compte-rendu suite à la visite effectuée à ce Musée à Castelnau. Cela ne fait pas de mal de se remémorer cette période de notre histoire.
Merci à la conférencière bénévole et à la Présidente de l’avoir programmé.
M.BONNET